Le futur, c’est un peu l’arnaque du siècle. On imaginait des voitures volantes, des ordinateurs parlants, des robots qui font les tâches ménagères, des dictées magiques en remplacement des cahiers d’écoliers… Eh bien, rien de tout cela en fait.\r\Les voitures touchent toujours désespérément le sol, les ordinateurs ont toujours l’apparence d’un PC 1512 et sont restés aussi peu loquaces que ce brave Bernardo.
Alors quand j’ai proposé l’idée de collaborer à ce vieux diable de Mr-Pink pour la réalisation d’un dossier, et que celui-ci désigna comme thème « Le futur du jeu vidéo », mon sang n’a fait qu’un tour.
D’abord, le futur, c’est quoi ? Comment en parler de manière appliquée au jeu vidéo ? Si l’on part du principe que depuis toujours, le futur est l’amplificateur des signaux faibles du présent, alors rien ne vaut une bonne analyse des tendances actuelles pour débuter. Ce qui nous laisse ensuite tout un tas de possibilités pour divaguer…
Bonne lecture !
Chapitre 2: 128 bits : On fait le bilan ? (calmement)
Chapitre 3: Jeux vidéo et Marketing
Chapitre 4: Un métier d’avenir : Décorateur de jeu vidéo
Chapitre 5: Gameplay : Quelle direction au prochain croisement ?
Chapitre 6: Le cheval de Troie (cent-soixante)
Chapitre 7-a: Bonus track : Une journée de 2010 chez Mr Pink
Chapitre 7-b: Bonus track : Une journée de 2010 chez Chuck
Chuck/Mr Pink
128 bits : On fait le bilan ?
Avant de regarder vers l’avenir, un petit coup d’œœil dans le rétro s’impose. La génération de console qui s’apprête à tirer sa révérence a été le théâtre de profonds changements pour le jeu vidéo aussi bien sur les plans économiques, techniques que conceptuels.
A chaque fois, c’est la même rengaine : A chaque évolution technique, à chaque nouvelle génération, les aficionados hurlent au loup : La nouvelle génération, c’est la fin des jeux vidéo, la fin de la créativité, bref, ils sont en train de pervertir notre enfant chéri. Mais en regardant en arrière, l’ex-nouvelle génération que sont les 128 bits actuelles a vu un peu de l’innocence des joueurs s’en aller : L’épopée 128 bits a commencé par une double claque. Encore étourdis par le plaisir que leur a donné leur Dreamcast, les joueurs se sont retrouvés K.O : Sega et le hardware, c’est fini. Alors que la bataille à coups de grands jeux entre la petite blanche et la grande noire s’annonçait passionnante, la voila qui tourne en eau de boudin lors de l’échauffement.
En tout cas, si cette bataille a tourné court, la situation qui s’en suivit confirma une chose : Le monopole n’est pas une situation saine pour le marché. La période pendant laquelle la PlayStation 2 s’y est retrouvée seule ne restera pas dans les annales comme celle d’une avalanche de hits. Il a donc fallu attendre l’arrivée des challengers Nintendo Gamecube et Microsoft XBox pour réveiller le marché, et secouer le cocotier duquel tombent les bons jeux.
A noter : Si cette génération a vu disparaître un constructeur, elle en a vu apparaître un autre. Un hasard du calendrier, et quelques exclus bien senties (Jet Set Radio Future, Panzer Dragoon Orta) qui ont permis à Microsoft de récupérer une partie des joueurs laissés à l’abandon par Sega.
Le retrait de Sega n’est cependant que la partie visible de l’iceberg. Il n’est que le plus éclatant des profonds changements qu’a subi le jeu vidéo. Si le jeu vidéo est un rêve éveillé, alors le virage 128 bits est un peu comme le réveil qui sonne : Le passage d’un monde créé sur mesure pour les joueurs à une parodie de réalité. Les jeux « à l’ancienne » se marginalisent, c’est un fait indéniable. Les tentatives faites dans ce créneau tel Viewtiful Joe, F-Zero GX ou encore OutRun 2, pourtant pétries de qualités ludiques se sont ramassées au hit parade. Un bon gameplay ne fait plus un jeu vendeur, et d’autres critères conditionnent le succès d’un titre.
La licence - bien que ce fait ne soit pas si nouveau- est devenu un élément prépondérant. Il suffit de s’attarder un peu sur les titres sortis par Electronic Arts sur 128 bits pour illustrer ce changement. Loin de moi l’idée de lancer le débat stérile sur la qualité de leurs jeux, mais force est de constater que leur production basée sur des films à succès et sur le rachat de franchises éprouvées (Burnout, Time Splitters), sans oublier les succès maison (Medal of Honor, Need For Speed, FIFA…) a trusté la tête des charts depuis 3 ans.
\r\Cette politique est devenue une tendance lourde, puisque Ubi Soft suit désormais le même chemin avec des licences (Prince of Persia, Splinter Cell) mises à jour une fois l’an. Dans ces conditions, seuls quelques développeurs « premium » -Kojima, Mikami, Michel Ancel - peuvent se permettre de ne sortir qu’un jeu tous les trois ans et d’y apporter une touche vraiment personnelle.
\r\Les développeurs perdent en effet le contrôle de leurs productions sous la pression des impératifs marketing. Un bel exemple est le changement d’orientation de Prince Of Persia. Bien que « Les sables du temps » ait été un succès à la fois commercial et critique, le feedback des joueurs américains était que le Prince « faisait gay » . Ainsi soit-il, la suite sera dark et mature. Comment un créatif peut-il faire « son » jeu dans de telles conditions ?
Cette attitude du tout marketing semble malgré tout rester l’apanage des grands éditeurs occidentaux. Le japon nous a encore démontré qu’il était possible de réaliser des jeux forts (Resident Evil 4, Ico) en se passant de clins d’oeils teenager. Que ce soit les Wario Ware, Katamari Damacy, ou les productions Nippon Ichi, les jeux japonais ont cédé du terrain sur le plan des parts de marché, mais pas encore rendu les armes en ce qui concerne l’originalité et surtout… le plaisir !
Qu’ils en soient bénis : Alors que les grosses productions occidentales se banalisent et se recopient les unes sur les autres (FPS historique / Simulation de gangsta / Jeu de caisses tunées) à trop vouloir singer la réalité, les japonais conservent dans leur conception du jeu vidéo une grande place à l’imaginaire.
Le retro-gaming et le succès fulgurant de la Game Boy Advance ne peuvent que leur donner raison. Nous sommes capables de nous amuser, de nous évader avec des graphismes pixélisés et des musiques à base de blips. Nous savons donc faire appel à une partie de notre cerveau ne limitant pas le champ de l’amusement aux graphismes photo-réalistes. Le jeu rétro doit compenser ses carences graphiques. C’est pourquoi la qualité des interactions y revêt alors une plus grande importance que chez son homologue contemporain. Des sensations… au-delà des pixels !
Après tout, les jeux old-school qui ont fait le succès de la GBA font passer l’esbroufe au second plan : En ces temps de bump-mapping à outrance, c’'est une occasion unique de se rappeler que le « jeu » contenu dans le terme « jeu vidéo » y est primordial.
Jeux Vidéo et Marketing
L’imbrication de ces deux termes est de plus en plus d’actualité. Des pubs Final Fantasy sur M6, aux promotions de Fifa et PES dans les stades de foot, la couverture médiatique des produits vidéoludiques de gros calibre tend à se démocratiser, creusant ainsi un véritable fossé avec la promotion de jeux dits confidentiels. On se souvient que Halo 2 fut le produit culturel le plus vendu durant toute l’année 2004, en grande partie car il avait bénéficié d’un étalage marketing sans précédent, touchant ainsi le light user en plein cœœur.
On peut alors se poser une question essentielle : la réussite d’un titre dépend-elle de son aura médiatique ? Si, dans la majorité des cas, un jeu bien affiché se vend très bien, un titre comme Ico par exemple, totalement inconnu du grand public car snobé par Sony lui-même, pour un jeu quand même réalisé en son sein, a survécu au naufrage grâce à un bouche-à -oreille efficace. Idem pour le génial Oddworld : La fureur de l’étranger. Des jeux uniques, frais, mais boudés par un public de masse séduit par les grandes affichettes, les publicités et les suites EA.
A ce sujet, et le phénomène a pris une ampleur démesurée depuis une dizaine d’années, l’industrie du Jeux Vidéo est régie par les acheteurs qui donnent des signes forts aux développeurs. Ceci déterminant les nombreuses suites (souvent moyennes) de jeux quant à eux originaux. Je pense ici à la récente production Capcom, Devil May Cry voire Viewtiful Joe en tête.
D’ailleurs, chez Microsoft, on pense qu’un joueur peut dépenser plus de 60 euros pour un jeu et que nous l’avons démontré. Ah bon ? L’avenir nous dira si le jeu, loisir avant tout, ne deviendra plus qu’une lubie de luxe (ce qui est déjà partiellement le cas) et si les gens resteront éternellement dupes face à un marketing de plus en plus vindicatif, abusif, voire trompeur.Dans un registre plus sournois, EA fut surpris en flagrant délit lorsqu’après avoir racheté Critérion (la série Burnout) à Acclaim, la firme rouleau compresseur décida de dispatcher sur de nombreux circuits, des panneaux publicitaires tout simplement honteux de leur « nouvelle » production.
A vrai dire, les productions mineures n’intéressent pas les investisseurs, l’exemple le plus efficace résidant en l’intrusion du monde du cinéma et des liens étroits et forts qu’il commence à nouer avec le Jeux Vidéo. Le schéma devient d’ailleurs de plus en plus classique : un jeu à fort potentiel économique, un film dessus. L’inverse fonctionnant tout autant.
Les connaisseurs se souviendront avec un émoi certain des productions d’Uwe Boll (coupable du film Alone in the Dark ou du terrifiant House of the Dead, par exemple) prouvant à la face du monde entier que la nullité de connaît pas de limite, tout comme son compère Alexander Witt, responsable de l’affolant Resident Evil : Apocalypse (un nom bien trouvé). On attend avec impatience le film basé sur la série Halo qui a lui, été confié à un réalisateur ayant fait ses preuves, Peter Jackson (Le Seigneur des Anneaux, le fabuleux/grandiose/magistral Braindead).
\r\\r\A l’inverse, les films convertis en Jeux Vidéo débouchent parfois sur un divertissement correct. La production Dysney/Pixar séduit les enfants, Spiderman n’est pas trop mauvais… En substance, une licence ne se cantonne plus qu’à un seul et unique registre, elle s’exporte pour atteindre toutes les cibles potentielles.
L’argument « jouez ce que vous avez vu » faisant mouche à coup sûr, pourquoi s’en priver, surtout quand les gens achètent ! On ne compte ainsi plus les produits dérivés de séries phares, T-Shirt, strings, bandanas et j’en passe… (cf : la combinaison du parfait Leon S. Kennedy, la manette tronçonneuse…).
De plus, il n’est pas impossible que ces alliances d’intérêts s’accroissent avec l’émergence de la nouvelle génération. Dernièrement, Peter Jackson (King Kong) a travaillé en étroite collaboration avec Michel Ancel, en vue d’une élaboration judicieuse de l’Official Game of The Movie, guidant de manière plutôt restrictive les choix du créateur français. Avec le rendu photo réaliste promis, le Jeux Vidéo se rapproche de plus en plus du cinéma.
Dans un registre parallèle, la série Metal Gear Solid, entre autres, prouve néanmoins qu’une bonne utilisation des références et des codes cinématographiques peut engendrer d’excellents jeux. Mais le JV ne risque t’il pas de devenir de plus en plus un sous-produit du cinéma, ou plus justement, une de ses extensions, un maillon dans la chaîne d’un marketing puissant drainant dollars et mentalités ?
Il ne faut pas ainsi nier un fait indéniable : le divertissement devient global, le cinéma, le JV, la B.O, le site internet, tout se mélange pour créer une expérience, une sorte d’'entertainment multimedia et multisupports dont les majors rêvent depuis des années… Nous ne sommes plus amenés à consommer un produit, une branche, mais bien à nous farcir l’ensemble de l’arbre.
Décorateur de jeu vidéo
Bientôt, on rira de l’ancien temps. Celui où tout d’abord l’immense majorité des développeurs de jeu vidéo codait entièrement leurs jeux. Quand on y pense, combien de moteurs de jeux réalisés pour un résultat visuel qui au final ne se différenciait pas tant que ça ?
Les éditeurs l’ont vite compris, et quitte à faire passer le Jeu Vidéo d’un stade artisanal à celui d’une industrie, autant s’inspirer des tics de cette dernière : Ce n’est donc pas un hasard si le recours à la sous-traitance est une tendance lourde depuis quelques années.
Certains développeurs ont ainsi une double casquette : Celle de la boîte qui développe des jeux pour les gens comme vous et moi, et celle de la boîte qui vend de sa technologie à ses concurrents. Et dont les jeux représentent la meilleure vitrine… Vous suivez ?
Un bon exemple est celui de Criterion avec Burnout, qui est un jeu visuellement spectaculaire : En plus de leur permettre d’en vendre des tonnes (L’aspect graphique reste un critère d’achat prépondérant), ils démontrent leur savoir faire et le potentiel de leur technologie Renderware aux autres développeurs, désormais clients potentiels. En leur proposant un moteur performant et multi plateforme, Criterion a séduit les grands éditeurs voyant d’un bon œœil le fait d’éviter les soucis de développement pouvant être à l’origine de retards et surcoûts… Cette tendance visant à externaliser le travail des développeurs n’en est qu’à ses balbutiements : Pour savoir ce qu’elle nous réserve à l’avenir, jettons un œœil sur ce qui s’est passé ailleurs…
Pour ceux qui ne le savent pas encore, Hollywood n’est pas qu’un titre de Madonna. C’est avant tout un quartier de Los Angeles où les studios de cinéma ont élu domicile à partir de 1910. Si beaucoup pensent que le jeu vidéo se rapproche du cinéma, alors il peut être intéressant de se pencher sur l’histoire de ce dernier…
\r\Lorsque des films étaient tournés dans les studios des majors, les décors et les costumes étaient ensuite toujours précieusement conservés. Pas pour être exposés dans des Planet Hollywood, mais simplement pour être réutilisés ultérieurement.
En effet, un même costume de pompier, une même table de cuisine, une même rue pavillonnaire peuvent apparaître dans différents films sans même que le spectateur ne s’en rende compte… Par contre, le comptable de la Fox ou de la Paramount était lui aux anges : il avait économisé de gros sous dans l’opération.
Les graphismes représentent le nerf de la guerre des Gigaflops que se sont déclarés Microsoft et Sony. Cette orientation lors de la conception de leurs machines respectives (les spécialistes disent clairement que l’architecture des PS3 et Xbox 360 sont orientées plus vers la puissance graphique que vers la puissance de calcul brute) va avoir une influence sur la façon dont les jeux vont être conçus. Car à force de faire de la qualité d’affichage un argument massue, les constructeurs s’engagent, ou plutôt engagent les développeurs, à fournir des jeux aux niveau de détails jusque là jamais atteint…
Si sur les 32 bits on pouvait se satisfaire d’une bouillie de pixels en guise de public dans un jeu de sport, le minimum syndical dans un jeu Next-gen sera un public entièrement en 3D dont la modélisation sera -pour chacune des personnes le composant- au niveau de celle d’un perso principal 128 bits…
De même pour les arbres, on n’imaginera pas se balader dans une forêt dont un arbre sur deux est un clone. Le seul problème, c’est que ce niveau d’exigence graphique va avoir un coût, et c’est là encore que notre comptable intervient. En effet, alors que la modélisation de contenu sera de plus en plus coûteuse en temps, pourquoi ne pas chercher à l’optimiser pour économiser quelques deniers ?
Les consoles de prochaine génération vont permettre d’afficher des objets fidèlement reproduits et au rendu réaliste. La réalité étant un « idéal » graphique pour le virtuel, la représentation des objets de polygones va se rapprocher de manière asymptotique de l’apparence réelle du modèle. Il est donc facilement concevable de trouver dans deux jeux différents une représentation proche d’un même objet réel.
Prenons un exemple simple : une voiture. Imaginons qu’un Gran Tursimo prochaine génération atteigne un niveau de détail tel que la différence avec la réalité est imperceptible. Imaginons aussi que pour les besoins d’un autre jeu, par exemple un futur The Gateway, un autre studio de l’éditeur ait à modéliser des véhicules.
Vu la charge de travail que représente la modélisation d’un véhicule, il est probable que cette seconde équipe de développement ne s’embête pas à re-modéliser le modèle qu’elle souhaite, mais ré-utilise simplement celui présent dans GT.
Ce raisonnement peut s’appliquer à tout type de contenu 3D réaliste. Un banc public, un lampadaire, un pavillon de banlieue, une rue de Londres, un stade de foot pourraient très bien faire partie d’un catalogue d’éléments 3D dans lesquels viendraient piocher les développeurs.
On pourrait ainsi imaginer que des sociétés se spécialisent dans la modélisation d’objets courants, puis les commercialisent.Cette pratique existe déjà ailleurs, notamment dans le domaine de la CAO : Afin de décharger leurs dessinateurs des tâches fastidieuses, de nombreuses entreprises achètent des catalogues d’éléments mécaniques standards (vis, écrous, joints, etc…) prêts à être intégrés.\r\
En parallèle, d’autres moyens vont permettre de réduire les coûts de modélisation de contenu. Je pense notamment au logiciel GenHead (http://www.genemation.com/video.cfm) qui permet de générer des visages réalistes aléatoirement. Imaginez donc le gain de temps pour l’équipe qui doit modéliser un public détaillé !
Ce logiciel ouvre certainement une brêche : Celle des logiciels qui permettent la modélisation automatique. D’autres applications sont à prévoir, et on peut parier sur leur utilisation pour modéliser des éléments organiques par milliers. Dans la nature, un chêne ressemble toujours à un chêne, une rose ressemble toujours à une rose, sans pour autant qu’aucun n’ait jamais de clone.
Il n’est donc pas envisageable de se promener dans une forêt virtuelle dont tous les arbres seraient identiques. Par contre, une forêt d’arbres créés aléatoirement selon des paramètres variables (type de l’arbre, densité du feuillage, âge) serait parfaitement crédible.
Ce genre de moyens, que ce soit la réutilisation de modèles existants ou la génération aléatoire de contenus, va certainement faciliter la tâche des développeurs pour la prochaine génération de consoles.
A vrai dire, en tant que joueur, on doit se réjouir que les développeurs puissent passer leur temps à autre chose qu’à la modélisation de contenu réaliste. La tendance que l’on risque d’observer si ce phénomène a bien lieu, on pourrait assister à un nivellement comme ce fut le cas avec la standardisation des moteurs 3D.
Cependant, si la généralisation de RenderWare a en effet permis à la majorité des jeux 128 bits d’exhiber une technique honorable (il faut en effet se rappeler du nombre de jeux 32 bits gâchés car mal programmés pour se rendre compte du cap franchi…), son effet pervers est de faire la majorité des jeux actuels se ressembler : mêmes effets de lumière, même motion blur, mêmes effets de particules… Et demain, mêmes environnements, mêmes figurants ?
Gageons que les progrès en matière de modélisation et l’optimisation des tâches qui y sont liées permettront aux jeux de garder chacun une patte graphique. A vrai dire, le cinéma, dans lequel tous les films utilisent la même matière première y parvient bien… ou tant bien que mal, c’est selon !
\r\
Gameplay : Quelle direction au prochain croisement ?
Le Gameplay d’un jeu est l’une des pierres fondatrices de son existence. Il détermine, par son orientation, nombre de sensations et de ressentis que le joueur éprouvera, manette en mains. Si le Jeu Vidéo a énormément souffert d’un manque de renouvellement et d’originalité durant l’ère 128 Bits, il ne faut ainsi pas chercher plus loin. Quantités de gameplays n’ont pas été renouvelés, le joueur s’accoutumant et développant inévitablement une forme d’usure.
\r\L’année 2005 fut l’année de l’éclosion de deux consoles portables nouvelle génération, figures de proue de deux mentalités très différentes. La PSP de Sony est une console transportable, à mi-chemin entre une Playstation gonflée à bloc et une PS2 fébrile. Son interface, sa prise en main ne laissent aucun doute planer quant à son orientation : une bête de puissance, pensée pour des transpositions faciles. Si la machine ne se vend pas aussi bien que la DS, au Japon par exemple, c’est parce que beaucoup de joueurs estiment y trouver des jeux identiques à ceux de leur PS2, mais en moins bien, et pour seulement 10 euros en moins. Cette console ne se sauvera donc qu’avec ses jeux originaux.
Un constat amusant pour la concurrence. Nintendo, avec sa DS, a pensé sa machine en proposant aux développeurs une interface différente, inédite. Tactile. Si le concept a été autant adulé que décrié avant la sortie de la machine, il faut tout de même avouer que Nintendo a encore réalisé un tour de force.
Convaincre le joueur actuel que la puissance ne fait pas tout. Qu’un bon gameplay bat des graphismes somptueux. La récente rafale de gros titres sur cet hardware a de plus prouvé l’intérêt certain des plus grands studios de développement (Square, Namco, Capcom, Sega et bien sûr, Nintendo), ce qui n’est pas du tout négligeable au moment de choisir sa machine.
A l’orée de la nouvelle génération concernant les consoles de salon cette fois, un constat très clair apparaît. Sony et Microsoft vont se disputer la part du lion, à coup de graphismes épatants, de prouesses techniques, de bluff. Sans pour autant bouleverser les habitudes, changer les gameplays, de manière globale. Non, le support manette, très contraignant, ne le permettra pas, ou très peu. La puissance, au mieux, sera donc mise au service d’une immersion sans pareille, de développements de mondes fabuleux, vastes.
\r\Sans vouloir verser dans une masturbation dédiée à Nintendo, il faut tout de même reconnaître une certaine forme de vérité. Sony et Microsoft n’auraient jamais eu les couilles de parier sur un concept aussi révolutionnaire (c’est le terme) en guise de nouvelle console. Trop d’enjeu, trop de licences à porter, déporter, copier/coller, trop de noms ronflants qui n’auraient pas toléré un changement de cap aussi important.
Nintendo nous refait donc le coup de la DS, avec une interface improbable et qui nourrit en son sein bien sûr les mêmes débats que la Dual Screen en son temps. Pénétrer au cœœur du jeu, interagir physiquement avec le déroulement de l’aventure. Le constructeur nippon ose, bouleverse les habitudes, persiste et signe dans sa politique parallèle.
Pas de course à la puissance, non. Mais une course au gameplay, où la puissance et l’interface seront mis au service du joueur et de nouvelles expériences. Il nous reste encore le temps de fantasmer, mais seul l’avenir nous dira si ce positionnement couillu attirera les développeurs et sera source de bons jeux, surtout.
Cependant, un certain équilibre est à trouver dans l’argumentaire. Les récents Katamari Damacy, Ico, Shadow of the Colossus, prouvent qu’une interface de jeu contraignante peut amener des gameplays novateurs et des expériences hors du commun. En réalité, cet article ne tend pas uniquement à stigmatiser des firmes frileuses, mais bien à démontrer que les développeurs pensent trop leurs jeux pour ne pas trop surprendre, pour conforter le joueur dans son univers, pour ne pas trop le chambouler. Pensez donc aux nombreux Doom-like et autres GTA-like (True Crime…), copier/coller sans surprises de jeux innovants. Le joueur lambda n’aime pas tout réapprendre. Il n’a pas le temps ni l’envie.
L’entreprise vidéoludique ne changera donc certainement pas dans un futur proche, d’où la manœœuvre extrêmement louable de Nintendo d’imposer aux développeurs un hardware différent pour des jeux différents et pour une cible différente. Une occasion certaine aussi de contenter les blasés grincheux, une des pires espèces de joueurs sur cette planète.
Cela étant, il nous reste une petite place pour espérer la confirmation ou l’explosion de genres jusqu’alors restés au stade lambda pour des raisons techniques. Ce fut le cas pour le FPS, genre qui connaît son apogée depuis 5 ans. Qu’aurait donné par exemple un titre comme Fable avec plus de temps, de moyen et de possibilités créatives…
Quoiqu’il en soit, la nouvelle génération nous promet, sur le papier, quelques changements notables. Plus d’immersion, plus de visuel et espérons-le bien fort, des gameplays novateurs, inédits. C’est en ceci que réside le souffle nouveau du Jeu Vidéo. Seul l’avenir nous le dira.
Le cheval de Troie (cent soixante)
Les entreprises n’ont jamais été réputées pour leur philanthropie. Même celles que l’on porte bien haut dans notre cœœur ne dérogent pas à cette règle de base : L’objectif principal d’une entreprise est de gagner de l’argent. Si la rentabilité est leur critère principal, leur politique propre les amène à poursuivre des objectifs spécifiques. Le petit monde des constructeurs de consoles n’échappe pas à ce constat : Tous tendent à gagner de l’argent, et à suivre une politique forte. Tous ? Enfin presque…
Pas la peine de vous faire un dessin : Le seul constructeur qui n’affiche pas d’ambitions en dehors du gain de parts de marché est Microsoft. Nintendo veut d’ouvrir le marché aux non-joueurs en proposant des jeux et des concepts faisant l’unanimité. Sony tente lui de s’adresser à tout le monde, mais en occupant des niches. D’abord avec la PsOne, dont les jeux de lancement s’adressaient aux jeunes adultes, puis progressivement à tous les types de joueurs. Puis avec la PS2, qui avec l’Eye Toy, SingStar ou aujourd’hui Buzz, amène de nouveaux types de joueurs, en proposant de nouveaux gameplays.
Bien sûr, dire que Sony ne fait que du fresh games est faux :La Ps2 est quand même la reine des blockbusters et des licences annuelles. Mais la famille PlayStation a toujours su apporter quand il le fallait les jeux risqués qui rendent son succès difficilement critiquable.
Si les motivations de Nintendo (Le jeu vidéo pour tous) et de Sony (Faire du jeu vidéo l’ultime entertainment) sont sans ambiguïté, celles de Microsoft le sont nettement. L’argent, bien sûr, car le jeu vidéo est un marché florissant et il est tentant de vouloir sa part du gâteau. Mais en cela, Microsoft ne se distingue pas de ses concurrents.
Par contre, hormis un Halo définissant un nouvel ordre pour les FPS sur console et un Xbox Live malgré tout marginal (seulement 10% des joueurs Xbox y sont abonnés), l’apport fait par la Xbox au monde du jeu vidéo est réduit.
Pis encore, la Xbox 360 n’amène aucun nouveau concept et ne prend aucun risque. Cela pourrait se comprendre pour le